LES TRAITEMENTS DES CARCINOSES PERITONEALES

Sommaire

Chimiothérapie Systémique (Intraveineuse ou orale)

Qu’est-ce que la chimiothérapie ?

La chimiothérapie est une association de médicaments dont l’objectif est la destruction des cellules cancéreuses. L’administration peut être intraveineuse ou orale afin d’atteindre la maladie quel que soit sa localisation dans le corps.

La chimiothérapie peut soit détruire les cellules de manière directe, soit empêcher leur multiplication.

Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de l’Institut National du Cancer.

Avant la chirurgie

La chimiothérapie avant la chirurgie est baptisée chimiothérapie néoadjuvante. Son objectif est de diminuer la taille de la tumeur de manière à faciliter le geste chirurgical. Elle a également pour rôle de limiter le risque de récidive. Surtout, dans notre cas précis, elle renseigne les médecins sur l’efficacité de la chimiothérapie sur la tumeur. En effet, les mêmes molécules de chimiothérapie peuvent être utilisées avant, pendant et après l’opération.

Souvent, la chimiothérapie néoadjuvante compte entre 4 et 6 cures. La plupart du temps, elle est réalisée sur une chambre implantable positionnée par un médecin spécialisé.

Après la chirurgie

Même si le geste chirurgical a pu être complet et qu’il ne reste plus de maladie, une chimiothérapie peut être proposée aux malades. Cette chimiothérapie est dite adjuvante. Son objectif est de diminuer les risques de récidive (que ce soit les récidives locales directement dans le péritoine ou à distance comme les poumons ou le foie).

Si les malades n’ont pas eu de chimiothérapie néoadjuvante, elle peut compter jusqu’à 12 cures et si les malades ont déjà eu entre 4 à 6 cures, elles peuvent comporter entre 8 à 6 cures.

Au long court

La chimiothérapie peut parfois être proposée comme unique traitement s’il n’existe pas de possibilité de geste chirurgical.

Son objectif sera alors soit d’offrir une baisse importante de la masse tumorale et ensuite de la conserver au plus bas, soit de limiter l’évolution de la masse tumorale.

Cette chimiothérapie est souvent envisagée au long court, sur une durée de plusieurs mois voire années, pour bénéficier d’une qualité de vie acceptable.

Quels produits de chimiothérapies ?

Dans la majorité des cas, les produits utilisés pour le traitement des maladies rares du péritoine comme le pseudomyxome et le mésothéliome sont le 5FU, l’oxaliplatine, l’irinotecan, le cisplatine, la doxorubicine. Ils peuvent être associés et donner des protocoles comme le FOLFOX et le FOLFIRI, par exemple. Le FOLFOX et le FOLFIRI peuvent également être couplés à des thérapies ciblées comme des anticorps monoclonaux tels le Bevacizumab et le Panitumumab.

Dans le cadre des séreux primitifs du péritoine, la chimiothérapie s’oriente plutôt sur des produits comme le carboplatine, le taxol, le caelyx, etc…

Essai Clinique

En 2020, l’essai clinique TALAMESO a été mis en place en France. Il est coordonné par le Pr Benoît You et le Dr Vahan Kepenekian des Hospices Civils de Lyon. Il s’agit d’un essai de phase II évaluant l’efficacité d’une maintenance par talazoparib après chimiothérapie de 1ère ligne à base de platine pour Mésothéliome Malin Péritonéal et Pleural.

Pour en savoir plus : le récapitulatif, en anglais.

Chimiothérapie Intra-Péritonéale

Qu’est-ce que la chimiothérapie Intra-Péritonéale ?

La chimiothérapie est une association de médicaments dont l’objectif est de détruire les cellules cancéreuses. Dans le cadre de la chimiothérapie Intra-Péritonéale, les traitements sont administrés directement dans la cavité péritonéale, au contact des organes abdominaux.

Comment fonctionne la chimiothérapie Intra-Péritonéale ?

Lors d’un geste chirurgical, un médecin met en place un cathéter directement dans l’abdomen. Grâce à ce cathéter, la chimiothérapie peut être administrée sur plusieurs cycles.

Ensuite, les cures de chimiothérapie ont lieu en service d’oncologie, comme une chimiothérapie intraveineuse classique, c’est juste la voie d’administration qui change.

Pour en savoir plus, l’Institut National du Cancer a mis des informations à disposition.

Cytoréduction

Définition de la cytoréduction ?

La cytoréduction est un acte chirurgical visant à réséquer ou détruire tous les implants péritonéaux de la maladie visibles à l’œil nu.

Histoire de la cytoréduction

Durant les années 90, le Pr Paul H. Sugarbaker a travaillé à la standardisation de la procédure chirurgicale des carcinoses péritonéales. Il est considéré comme l’un des pionniers, notamment avec la création du PCI (Peritoneal Cancer Index) permettant de cartographier l’étendue de la maladie péritonéale et l’atteinte des différents organes abdominaux.

Aujourd’hui, ce score est considéré comme une référence à travers le monde et différents outils ont été créés afin d’en faciliter l’utilisation comme Promise développé par l’équipe RENAPE.

Qu’est-ce que la cytoréduction ?

La cytoréduction est la réduction du volume de la tumeur. Son objectif est de supprimer les différents implants de la maladie disséminés dans le péritoine. Pour parvenir à la disparition complète de la maladie visible, le chirurgien est amené à réaliser des péritonectomies. Il s’agit de l’ablation des membranes péritonéales touchées. Malheureusement, si plusieurs organes à l’intérieur de l’abdomen sont atteints en profondeur, la contrainte est souvent de les enlever. Ce sont des exérèses viscérales. Elles peuvent aller d’un court segment de l’intestin à l’ablation complète de l’estomac en fonction de l’importance de la maladie.

Ce temps chirurgical peut être plus ou moins long. Il peut varier d’une à deux heures pour une maladie très localisée à plus de neuf ou dix heures si le stade est plus avancé.

Chimiothérapie Hyperthermique Intra Péritonéale (CHIP ou HIPEC)

Définition de la CHIP ?

CHIP est l’acronyme de Chimiothérapie Hyperthermique Intra Péritonéale aussi appelée HIPEC en anglais pour Hyperthermic Intra Peritoneal Chemotherapy.

Histoire de la CHIP en France

La première CHIP à ventre fermée a eu lieu en Europe, en 1989, à l’initiative du Pr François-Noël Gilly de l’hôpital Lyon-Sud. La seconde procédure à ventre ouvert, celle-ci, a été réalisée en 1990 à l’Institut Gustave Roussy par le Pr Dominique Elias.

Qu’est-ce que la CHIP ?

Depuis plus de 30 ans, la CHIP est proposée dans le traitement des carcinoses péritonéales qu’elles soient d’origines primitives ou secondaires. Cette technique est née d’une approche totalement différente de la maladie péritonéale. La carcinose péritonéale est une extension régionale, limitée dans le péritoine et donc dans la cavité abdominale de la maladie. Cette vision a permis d’envisager le traitement à visée curative des patients exempts de métastases à distance.

La CHIP ou Chimiothérapie Hyperthermique Intra Péritonéale consiste à « baigner » toutes les surfaces des organes et les différentes parois présentes dans l’abdomen avec un produit de chimiothérapie diluée dans du soluté. Différentes molécules ayant fait leurs preuves en intra-veineux sont utilisées comme l’oxaliplatine, le cisplatine, l’irinotecan, la mitomycine C…

Il existe deux grandes techniques pour réaliser ce traitement en fonction des centres. Une à ventre fermée et une à ventre ouvert. Elles sont toutes les deux utilisées depuis les débuts.

L’hyperthermie, consiste à obtenir une température comprise entre 42° et 43° dans la cavité abdominale. Elle permet de détruire les cellules tumorales par action directe, d’augmenter la pénétration de la chimiothérapie dans les tissus et de potentialiser son effet.

La durée de la CHIP varie entre 30 minutes, 60 minutes et 90 minutes.

Comment se déroule une CHIP ?

Avant l’intervention

Il est assez courant que les malades aient bénéficié de plusieurs cures de chimiothérapie néoadjuvante avant d’envisager une chirurgie. La CHIP étant considéré comme une intervention relativement « lourde », la décision de la proposer aux malades est prise en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) faisant intervenir à la fois des radiologues, chirurgiens, pathologistes, oncologues, gériatres…

Souvent des examens d’imagerie pré-opératoire sont réalisés par les malades afin d’apprécier au mieux l’étendue de la maladie. En cas de chimiothérapie néoadjuvante, ces examens de type scanner, d’IRM ou de PET-scanner permettent d’évaluer la « réponse » à la chimiothérapie.

Une consultation avec le chirurgien spécialisé a lieu avant toute prise de décision. A cette occasion, le médecin explique les risques de l’intervention chirurgicale et les bénéfices attendus de celle-ci. Une préparation digestive destinée à « nettoyer » le tube digestif peut-être proposée et une immuno-nutrition destinée à anticiper la récupération et diminuer le risque de complications post-opératoires peut être prescrite.

A ce titre, de plus en plus d’hôpitaux proposent aujourd’hui une préhabilitation permettant d’améliorer la vitesse de récupération post chirurgie. L’objectif est de « préparer » les malades à ces chirurgies « lourdes » en amont.

Un rendez-vous de consultation avec un anesthésiste a ensuite lieu. Ce spécialiste fait le point sur les traitements médicaux de chaque patient, les risques de l’anesthésie et le traitement de la douleur post-opératoire qu’il peut proposer. Anticiper et informer sur la prise en charge de la douleur permet de mieux la gérer une fois l’intervention terminée. Différentes techniques sont en effet aujourd’hui disponibles comme la péridurale, la pompe à morphine, etc…

Pendant l’intervention

L’intervention chirurgicale est réalisée dans un bloc opératoire stérile sous anesthésie générale. Les malades sont installés en décubitus dorsal (sur le dos) pour permettre au chirurgien de réaliser une laparotomie. La laparotomie est l’ouverture de la paroi abdominale, du pubis au bord inférieur du sternum.

Dans un premier temps, le chirurgien procède à un examen approfondi de la toute la cavité abdominale. Il côte l’étendue de la maladie grâce au score PCI de Sugarbaker. Ensuite, il peut soit procéder à une chirurgie de cytoréduction soit réaliser directement la CHIP.

Deux techniques de CHIP existent aujourd’hui en France. La technique à « ventre ouvert » dite du colisée et la technique à « ventre fermé ». Si la première est réalisée avant toute fermeture cutanée, la seconde nécessite la mise en place de drains et la fermeture de la peau par des fils ou agrafes.

Une machine de CHIP permet ensuite de faire circuler le liquide de chimiothérapie dilué dans plusieurs litres de sérum physiologique chauffé à 42°. L’objectif est de baigner tous les organes abdominaux sur une durée pouvant varier de 30 à 90 minutes.

Une fois la CHIP terminée, seuls restent en place les drains chirurgicaux destinés à évacuer les liquides comme le sang et à surveiller les éventuelles sutures chirurgicales réalisées. Les malades sont alors mutés pour une nuit, dans la plupart des cas, en service de réanimation.

Après l’intervention

Très rapidement, le patient est réveillé et extubé. Sa douleur est prise en charge immédiatement que ce soit avec des techniques d’administrations de produits en continu comme la péridurale ou « à la demande » comme les antalgiques intraveineux.

Les personnels paramédicaux proposent un lever rapide afin de diminuer la perte musculaire par une mobilisation précoce. Cela évite aussi certaines complications liées à l’alitement prolongé comme les phlébites ou les infections respiratoires.

Quelques conseils hygiéno-diétetiques pour vous aider après l’opération.

PIPAC

Définition de la PIPAC

La PIPAC est une Chimiothérapie intrapéritonéale Pressurisée par Aérosols. Elle consiste à vaporiser de la chimiothérapie directement dans la cavité péritonéale sous forme d’aérosol par l’intermédiaire d’un abord chirurgical réalisé sous cœlioscopie.

Histoire de la PIPAC en France

La technique de PIPAC a été créée par le Pr Marc-André Reymond en Allemagne, en 2013. La première PIPAC a été réalisée en France en 2016, grâce au travail du Dr Naoual Bakrin, au Centre Hospitalier Lyon-Sud. Actuellement de nombreux chirurgiens des centres spécialisés RENAPE se sont formés et beaucoup proposent un accès à cette nouvelle technique.

Qu’est-ce que la PIPAC ?

Partant du principe que la maladie péritonéale est une maladie localisée dans la cavité péritonéale, la PIPAC consiste à administrer une chimiothérapie directement sur les nodules tumoraux, dans la cavité péritonéale. L’objectif avoué de cette technique est de limiter les effets secondaires de la chimiothérapie intraveineuse et d’avoir une action plus importante en éteignant tout de suite la cible.

La PIPAC peut être proposée à toutes les personnes atteintes de maladies rares du péritoine ou de carcinoses péritonéales qui n’ont pas métastasées à distance. Actuellement, elle ne remplace pas la CHIP. Elle est plutôt proposée à des personnes qui ne pourraient pas bénéficier de CHIP pour différentes raisons (âge, étendue de la maladie, antécédents…). Aujourd’hui, en France, ce traitement est associé à une chimiothérapie systémique dans la plupart des cas.

Comment se déroule la PIPAC ?

Avant l’intervention

Les malades bénéficient d’une consultation chirurgicale avec un médecin spécialisé. Ce dernier explique le déroulement de l’intervention et les bénéfices et risques attendus.

Ensuite, une consultation d’anesthésie a lieu. Comme pour n’importe quelle intervention chirurgicale, elle permet de faire le point sur les traitements médicaux des patients, la prise en compte des antécédents et la gestion de la douleur en post-opératoire.

Les patients sont hospitalisés la veille ou le jour même de la PIPAC. Ils peuvent avoir un bilan sanguin soit à l’hôpital, soit en ville.

Pendant l’intervention

L’intervention chirurgicale se déroule sous anesthésie générale, dans un bloc opératoire stérile. Le chirurgien crée un pneumopéritoine à 12 mmHG grâce à un matériel standard de coelioscopie. Une fois l’air entré dans la cavité péritonéale, une caméra et des instruments chirurgicaux peuvent être glissés en toute sécurité.

Une analyse de l’étendue de la maladie est réalisée en utilisant le PCI de Sugarbaker et des outils comme Promise développé par l’équipe RENAPE. Des biopsies peuvent ensuite être réalisées de manière à suivre l’évolution de la « réponse » de la maladie à la chimiothérapie.

Le nébuliseur est introduit dans un trocart et projette la chimiothérapie directement dans la cavité abdominale sous forme de fines gouttelettes. Les médecins s’assurent du bon déroulement de la procédure en temps réel grâce à une caméra. Concrètement, la nébulisation dure quelques minutes puis le ventre reste gonflé pendant 30 minutes de manière à permettre la diffusion la plus large possible du produit. Après cela l’exsufflation consiste à ôter l’air ayant permis le pneumothorax. Les matériels et trocarts sont retirés et les incisions refermées.

Après l’intervention

Une fois la PIPAC terminée, les patients sont transférés quelques heures en salle de réveil. Puis ils regagnent le service de chirurgie ou d’ambulatoire. Soit ils sortent le soir même, soit le lendemain. Une ordonnance est systématiquement remise avec des traitements antalgiques pour le post-opératoire à domicile.

Un essai clinique

En 2019 a été ouvert un essai clinique sur la PIPAC pour les patients atteints de mésothéliomes péritonéaux. Aujourd’hui, plusieurs centres en France proposent de participer à cette recherche baptisée MESOTIP : étude de phase 2, randomisée évaluant l’utilisation d’une chimiothérapie dite PIPAC en alternance avec la chimiothérapie systémique, par rapport à une chimiothérapie systémique seule, comme traitement de 1ère ligne, chez des patients ayant un mésothéliome péritonéal malin.

Pour en savoir plus : Etude MESOTIP.